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Document d’information précontractuelle : un bon exemple de ce qu’il ne faut pas faire

Cour d’appel de Paris, pôle 5, Chambre 4, 17 janvier 2018, 15/17647

Un franchiseur développant parallèlement plusieurs concepts de salons de coiffure ayant chacun des enseignes et des positionnements de prix différents, conclut avec une entreprise indépendante un contrat de franchise portant sur l’exploitation d’une unité à l’enseigne « COIFF & CO » située à Poitiers.

Après seulement quelques mois d’existence, le franchisé dépose le bilan.

Estimant que cette défaillance résulte de l’insincérité de l’information précontractuelle, le liquidateur assigne le franchiseur aux fins d’obtenir l’annulation du contrat de franchise, la restitution des dépenses engagées par le franchisé et des dommages et intérêts. Le dirigeant et associé unique du franchisé intervient également au procès aux fins d’être dédommagé à titre personnel.

Le Tribunal de commerce de Paris saisi de l’affaire ne fait que très partiellement droit aux prétentions des demanderesses qui interjettent appel.

Bien leur en prend car la Cour d’appel de Paris, infirmant partiellement le jugement, annule le contrat de franchise et condamne le franchiseur à indemniser tant le franchisé que son dirigeant et associé.

Pour ce faire, la Cour relève que le départ de onze franchisés dans les douze mois précédant la signature du contrat litigieux constituait un élément d’information essentiel pour la candidate de sorte que la dissimulation de cette information l’a empêchée d’appréhender avec exactitude la pérennité du réseau.

La Cour adopte le même raisonnement concernant l’état local du marché en relevant notamment qu’en transmettant au franchisé une étude d’implantation correspondant à un projet de création de salon dans un centre commercial alors que l’emplacement choisi était situé en centre-ville, en adressant des statistiques anciennes et en communiquant une étude de concurrence incomplète, le franchiseur a privé le candidat de renseignements essentiels à la manifestation de son consentement.

Enfin, la Cour d’appel sanctionne une fois de plus la remise d’un prévisionnel – dont on rappellera qu’il ne fait pas partie des document à transmettre au candidat – en indiquant que si ce document est facultatif, il doit, lorsqu’il est remis, être sincère et vérifiable, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

La Cour prononce par conséquent la résolution du contrat pour dol et condamne le franchiseur à restituer le droit d’entrée et les redevances versées. Elle y ajoute des indemnités au profit du dirigeant-associé  du fait de la perte de chance et du préjudice moral.

S’il n’a rien de révolutionnaire, cet arrêt constitue une piqûre de rappel pour les franchiseurs qui doivent être conscients de ce que l’obligation d’information précontractuelle ne tolère pas l’approximation et que, lorsque le franchiseur va au-delà de ce que prévoit la loi en remettant des prévisionnels d’exploitation, il doit à tout le moins veiller à ce que ces prévisionnels soient exacts et/ ou réalistes.

Martin LE PECHON
Avocat à la Cour
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