L’obligation pour le franchiseur, avant la signature du contrat de franchise, de remettre un document d’information précontractuelle (DIP) au candidat envisageant rejoindre son réseau est un principe bien connu.
Toutefois, au-delà du principe, le contenu du DIP, sa portée juridique et les cas dans lesquels il est obligatoire sont autant d’éléments mal maîtrisés, aussi bien par les candidats à la franchise que par certains jeunes réseaux.
En la matière, plusieurs règles essentielles doivent être rappelées :
- Qu’est-ce qu’un DIP ?
Le DIP est la traduction pratique de l’article L 330-3 du Code de commerce. Cet article oblige toute personne souhaitant mettre à disposition d’un cocontractant une marque ou un signe distinctif tout en exigeant de lui un engagement d’exclusivité dans l’exercice de son activité, à communiquer à ce cocontractant, au moins vingt jours avant qu’il signe le contrat définitif, un document d’information lui permettant de s’engager en parfaite connaissance de cause. Contrairement à une idée largement répandue, le document d’information précontractuelle n’est pas propre à la franchise. Il doit en effet être remis lorsque les conditions (marque + exclusivité) décrites ci-dessus sont remplies. Il est ainsi obligatoire dans de nombreux autres types de réseaux (concession, commission-affiliation …) et peut être facultatif dans certaines (rares) franchises qui ne pratiquent pas d’exclusivité.
- A quoi sert le DIP et quel est son contenu ?
Le DIP a pour but de permettre au candidat qui souhaite rejoindre le réseau, de disposer d’informations précises lui permettant de de s’engager en parfaite connaissance de cause. Le contenu du DIP est détaillé à l’article L330-1 du code de commerce. Il inclut ainsi une présentation du franchiseur, de ses dirigeants et de son réseau, une présentation de la marque, une présentation du marché national et local, une présentation du contrat de franchise et des dépenses spécifiques avant l’exploitation.
Le DIP n’est en aucune manière une plaquette commerciale ! Il n’a pas pour but de « vendre » le concept mais uniquement celui d’informer le candidat. Beaucoup de jeunes (ou moins jeunes) réseaux passent outre cette règle par ignorance, ce qui peut leur coûter cher. En effet, s’il va au-delà de son obligation d’information et qu’il transmet des éléments erronés, le franchiseur peut voir sa responsabilité engagée s’il est démontré que ces éléments ont induit le candidat en erreur. Cela est particulièrement vrai pour les prévisionnels d’activité qui n’ont pas à figurer dans le document d’information précontractuelle, le franchiseur n’ayant pas à s’engager sur les futurs chiffres du candidat.
- Quelle est la valeur juridique du DIP ?
Le DIP s’inscrit dans l’exécution d’une obligation d’information. Il ne constitue pas un contrat engageant l’une ou l’autre des parties, la remise du DIP n’obligeant ni le franchiseur, ni le candidat à signer, à terme, le contrat de franchise définitif. Tout au plus contient-il une clause de confidentialité qui interdit au candidat de divulguer les informations transmises. Enfin, s’il ne créait aucune obligation contractuelle, il peut engager la responsabilité du franchiseur lorsqu’il n’est pas conforme à la loi.
- Quelles sont les conséquences de l’absence de remise de DIP ou de la remise d’un DIP incomplet ?
En l’absence de remise de DIP ou en présence d’un DIP incomplet, le franchisé pourra mettre en jeu la responsabilité du franchiseur et solliciter l’annulation du contrat de franchise et l’obtention de dommages et intérêts. Il existe même une sanction pénale en cas d’irrespect de l’article L 330-3, mais cette sanction n’est en pratique jamais appliquée.
En outre, l’absence de DIP ou le caractère imparfait de ce dernier n’entraîne pas automatiquement la sanction du franchiseur car le franchisé doit établir qu’il a été induit en erreur dans sa décision de signer le contrat. Or, cette démonstration est loin d’être simple. De plus, les tribunaux considèrent à juste titre que le candidat, en tant qu’entrepreneur indépendant, doit lui-même faire l’effort de se renseigner sur le réseau qu’il entend rejoindre et ne peut se contenter d’attendre que des informations lui soient transmises.
En pratique, le franchiseur doit donc disposer d’un DIP millimétré qui s’en tienne à ce qu’exige la loi et rien de plus. S’il dispose d’un DIP solide, les risques de mise en jeu de sa responsabilité seront faibles et ce qui pourra apparaître comme une contrainte sera en réalité une assurance tout risque pour faire face aux comportements de certains franchisés mal intentionnés.
Martin LE PECHON
Avocat à la Cour
CLP Avocats