Cour d’appel de Paris, pôle 5, Chambre 4, 20 décembre 2017, 13/23287
La société EAT SUSHI INVESTISSEMENT conclut avec une entreprise indépendante un contrat de franchise autorisant celle-ci à exploiter un restaurant à l’enseigne EAT SUSHI à Montpellier.
Moins de trois ans après la signature du contrat, le franchisé fait part des graves difficultés qu’il rencontre et sollicite l’assistance du franchiseur.
Quelques mois plus tard, le même franchisé cesse de payer ses redevances.
Mis en demeure de régulariser la situation, il invoque alors l’exception d’inexécution, prétendant que la société EAT SUSHI INVESTISSEMENT manque à son obligation d’assistance et de formation.
Finalement, le franchisé dépose l’enseigne EAT SUSHI et la remplace par une nouvelle.
Face à cette situation, le franchiseur saisit le juge commercial duquel il sollicite la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs du franchisé, le paiement de l’arriéré de redevances et une condamnation de ce même franchisé au titre du manquement à l’obligation de non-concurrence post-contractuelle.
Le franchiseur est suivi par les premiers juges sur la totalité de ses demandes, ce qui conduit le franchisé – tombé entre-temps en liquidation judiciaire – ainsi que son dirigeant à interjeter appel.
En charge du dossier, la Cour d’appel de Paris rend un arrêt intéressant dont plusieurs enseignements peuvent être tirés.
Tout d’abord, la Cour écarte d’un revers de manche l’exception d’inexécution invoquée par le franchisé pour expliquer sa défaillance dans le paiement des redevances. Elle indique notamment que l’obligation d’assistance qui pèse sur le franchiseur est de moyens et que, du fait de son statut de commerçant indépendant, le franchisé est seul responsable de la gestion de son entreprise de sorte qu’il ne peut mécaniquement imputer au franchiseur les difficultés financières qu’il rencontre.
Elle conclut en indiquant que le grief relatif à l’absence de rentabilité du réseau et du concept ne peut être retenu que s’il est démontré que le franchiseur manque gravement à ses obligations contractuelles, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
La Cour se prononce ensuite sur la transmission du savoir-faire en constatant que si la formation a manifestement été très inférieure en termes de temps à celle prévue au contrat, le franchisé ne conteste pas qu’une formation a bien eu lieu. En outre, elle renvoie au fait que le franchisé a cessé de payer les redevances du franchiseur sans même avoir sollicité son assistance. De fait, l’exception d’inexécution n’est, là encore, pas recevable.
Cette décision permet de dégager deux enseignements essentiels qui, s’ils ne sont pas nouveaux, doivent pourtant être rappelés : le franchisé en qualité de commerçant indépendant ne peut imputer son échec au franchiseur, sauf à démontrer les manquements de ce dernier aux termes du contrat. En outre, le franchisé ne peut raisonnablement engager la responsabilité du franchiseur lorsqu’il a tardé à se plaindre, a attendu d’être mis en demeure pour le faire ou a lui-même manqué à ses obligations.
Martin LE PECHON
Avocat à la Cour
CLP Avocats